Bonshommes & Bloom
Didier Hamey
Mot de l’éditeur
Au pied des falaises de Saoû, un homme se penche et ramasse une brindille. Un geste simple, primitif. Pourtant, dans ce geste de cueilleur, tout l’art de Didier Hamey se révèle.
Avec cet ouvrage, nous avons souhaité explorer l’univers singulier de cet artiste, un univers où la nature se transforme en un bestiaire fantastique et poétique. Comme les chamans d’antan qui lisaient les signes du monde, Didier Hamey transfigure les fragments végétaux en une œuvre saisissante que nous sommes heureux de mettre en lumière.
De Dunkerque aux forêts de la Sarthe, de la Casa de Velázquez à Madrid jusqu’aux contreforts de la Drôme, son parcours dessine une quête incessante du lieu propice à l’émerveillement. Son atelier, aujourd’hui niché au pied de la forêt de Saoû – royaume de silence et de lumière -, est devenu un véritable cabinet de curiosités où s’entremêlent fragments d’écorces, pignes de pin et mystérieuses brindilles. Ces « morceaux de forêt », comme il les nomme, constituent le vocabulaire primordial d’une langue visuelle unique, présente dans de nombreuses collections publiques, du Fonds national d’art contemporain à la Bibliothèque nationale.
La magie opère lorsque l’artiste entame sa « bataille avec la matière ». Sur les plaques de plexiglas – plus tendres que le cuivre traditionnel -, la pointe sèche grave une novlangue faite de « mots-choses ». La sanguine, hommage subtil aux maîtres de la Renaissance, fait éclore un monde où la frontière entre règnes s’estompe. Des silhouettes surgissent, à la fois végétales et humaines, rappelant ces dessins « mescaliniens » qu’Henri Michaux traçait dans ses carnets. Une parenté spirituelle que l’on retrouve aussi chez Joan Miró, griffonnant ses « personnages magiques » entre les spirales de ses merveilleux carnets Catalans.
Le livre nous dévoile, dans un dialogue tête-bêche finement orchestré, deux séries emblématiques : les Bonshommes, nés dans l’effervescence madrilène et les forêts basques de la Casa de Velázquez, où l’artiste entreprit son « abécédaire des peuplades inconnues de la forêt », et les plus récents Bloom, ces fleurs-visages au regard pénétrant qui semblent nous observer depuis les profondeurs d’une nature oubliée. Ces créatures fantastiques s’inscrivent dans une tradition séculaire, évoquant ces Wilder Men que le photographe Charles Fréger a su capturer dans les rituels païens de l’Europe – ces hommes sauvages que les forêts, et non les loups, auraient élevés.
Raconteur silencieux, comme l’entendait Walter Benjamin, Didier Hamey renoue avec cette époque où, selon Pline l’Ancien, « les dieux habitaient dans les forêts avant de résider dans des sanctuaires construits de main d’homme ». Son œuvre, que cet ouvrage nous invite à découvrir page après page, nous rappelle que la frontière entre nature et imaginaire reste ce lieu fertile où l’art puise sa force primitive.
23 x 16,5 cm
80 pages en couleurs
Couverture souple, reliure à la japonaise
isbn 978-2-35532-440-6
33 €
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